En guise d’introduction Chantal Jouanno a rappelé le rôle de levier que peuvent jouer les régions, notamment grâce au fléchage des dépenses. Il subsiste malgré tout deux principaux impensés dans leurs actions : la biodiversité et la participation du public. Si Michel Badré s’est dit agréablement surpris par le panel de bonnes pratiques au sein des régions, il a toutefois souligné que les actions qui restent à mener sont les moins consensuelles. Selon lui, une bonne prise en compte de la question sociale des mesures est essentielle. Il faut s’efforcer de regarder quels sont les effets des mesures écologiques sur les 20% de la population les moins favorisés.
De manière générale, les régions rencontrent des difficultés dans la mise en application de leurs orientations stratégiques, a affirmé Chantal Jouanno. Elle a expliqué la nécessité de penser l’aménagement du territoire comme un écosystème global pour mieux saisir les enjeux qui entourent le changement d’affectation des sols et leur artificialisation. Selon elle, il est impératif d’identifier les conséquences sociales de chaque politique afin de pouvoir mettre en place des mesures de compensation et d’accompagnement. Elle s’est dite favorable à une stratégie climatique globale, mais également sectorielle. Sur cette thématique « climat », Michel Badré souhaiterait la création d’un système de concertation et de négociation entre l’État, les régions et les collectivités infrarégionales dans le but de mieux répartir les obligations bas carbone et ainsi avoir une chance d’atteindre les objectifs fixés. Il a expliqué qu’il y avait un véritable enjeu d’articulation entre petits et grands projets et entre stratégie régionale et nationale, notamment dans le domaine de l’énergie. Les deux grands témoins ont approuvé la remarque d’une personne de l’assistance qui regrettait l’absence d’une réelle stratégie régionale sur le stockage de carbone dans les sols.
Pour introduire le deuxième volet, Géraud Guibert a tenu à rappeler que si les circuits agricoles devaient être biologiques, et devaient également être de proximité, sans quoi les bénéfices s’annulaient. Pour illustrer l’importance de la proximité, Michel Badré a rappelé que l’empreinte carbone de l’alimentation des Français est largement supérieure à celle de l’agriculture française en raison de l’importation de denrées alimentaires souvent éloignées. Chantal Jouanno souhaiterait quant à elle que l’agriculture ne soit pas uniquement dans une logique de compétitivité et de développement économique, mais réintroduite dans une logique de soutenabilité. Selon Michel Badré, l’articulation entre adaptation et atténuation est encore trop largement méconnue au sein des régions ce qui peut conduire à des politiques contre-productives. Par ailleurs, l’un comme l’autre pense essentiel que chaque région définisse un plan de reconversion d’emplois et de formation cohérent avec leur réalité territoriale.
Enfin, sur le thème de la mobilité, les discussions ont principalement porté sur l’élaboration d’un bonus-malus pour les entreprises selon le temps de trajet domicile-travail de leurs salariés, sur la prise en compte de la mobilité subie et enfin sur le transport de marchandises. Chantal Jouanno a exprimé des réserves concernant cette proposition de bonus-malus en raison des potentiels effets pervers qui pourraient pénaliser les plus démunis. Afin de réduire les mobilités subies, elle a préconisé le développement du télétravail et des espaces de « co-working ». Michel Badré a rappelé l’importance des impacts sociaux liés aux enjeux de mobilité et donc la nécessité d’une approche par les coûts pour soutenir les plus défavorisés. Géraud Guibert a demandé aux deux grands témoins si une taxe régionale sur les transports de marchandises pourrait être mise en œuvre. Selon eux, il faudrait impérativement réfléchir en amont à l’écosystème qui entourerait cette taxe. Plusieurs questions se posent : à quoi va-t-elle servir ? Comment soutenir les personnes les plus défavorisées face à la hausse du prix des produits ?
Pour conclure, Michel Badré a expliqué que les régions devaient pleinement se saisir de leurs compétences dans la formation et l’orientation des financements afin que ces deux volets soient toujours mis au service de la transition écologique et de la préservation du climat et de la biodiversité. Selon Chantal Jouanno, l’enjeu de la cohérence entre les territoires ne doit pas mener à une recentralisation des compétences, il faut faire confiance aux territoires. Elle souhaiterait que l’ensemble des politiques mises en place par les régions aient suivi au préalable une étude d’impact sur l’environnement et le climat qui démontrerait leur effet positif pour la transition écologique. Cela permettrait un meilleur arbitrage entre les différentes propositions.