Politique Société

La Fabrique Ecologique fête ses 10 ans !

Publié le 26 octobre 2023

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Pour ses 10 ans, La Fabrique Ecologique a organisé une Table Ronde mardi 17 octobre 2023 au soir autour de la question « Quelles ruptures concrètes pour réussir la transition écologique? ». La Table Ronde s’est déroulée avec l’intervention de Delphine Batho, ancienne ministre et députée des Deux-Sèvres; Pierre Cazeneuve, député des Hauts-de-Seine; Flora Ghebali, entrepreneure en transition écologique et essayiste; Vincent Giret, ancien directeur de l’information de Radio France et responsable du projet « nouveau média transition écologique » du groupe les Echos; et Chantal Jouanno, ancienne ministre et senior advisor en charge de la transition écologique. A la suite de cette Table Ronde, animée par Géraud Guibert, président de La Fabrique Ecologique, nous avons eu le plaisir de partager un moment privilégié avec nos convives autour d’un apéritif et d’un buffet repas.
A l’occasion du dixième anniversaire de La Fabrique Ecologique, Lucile Schmid, « mère » de LFE, aujourd’hui vice-présidente en charge des relations universitaires et de la rubrique « Décryptage », prononce quelques mots introductifs afin de rappeler les motivations qui ont conduit à la création de La Fabrique Ecologique, à savoir développer une culture générale écologique.  
Géraud Guibert rend hommage aux marraines et parrains de LFE qui ont cru en ce projet il y a 10 ans. La technique et les financements sont importants, mais le président rappelle la réelle nécessité d’une rupture idéologique dans notre société pour mener à bien la transition écologique. 
La table-ronde commence avec Chantal Jouanno, marraine de LFE. Elle rappelle comme le contexte était différent dix ans auparavant où le sujet de l’écologie était très contesté. Pour elle, la fondation a été créée avec la conviction que les divergences d’opinion étaient une force, avec la volonté d’aller dans des cercles différents où il n’y a pas que des convaincus. Cela passe par un effort pédagogique pour provoquer une prise de conscience. Elle considère que nous ne sommes plus dans le temps des transitions, mais dans celui des ruptures. Nous sommes au pied du mur. Au-delà de la pédagogie se pose la question démocratique. Il faudrait un débat démocratique autour des solutions à apporter. Derrière chaque solution technique il y a un débat politique car chaque décision a un impact sur la société. L’ancienne ministre souhaite aller vers un approfondissement démocratique, que notre démocratie aille plus loin que les cercles de l’Assemblée nationale et du Sénat pour s’ancrer dans les territoires, auprès des personnes. A propos du défi du vivant, il faut prendre conscience de l’approfondissement de l’humanité. Quand on regarde l’évolution de l’humanité, il s’agit d’un élargissement de notre cercle de conscience : les esclaves, les femmes et les étrangers ne faisaient pas partie de l’humanité. Maintenant que l’on a élargi le cercle de l’humanité et que nous avons compris que nous sommes tous partie du vivant, le pas d’avenir sera d’élargir à d’autres éléments que l’humanité. 
Puis Delphine Batho propose de poser les enjeux de l’écologie comme des enjeux de sécurité et régaliens car ils engagent désormais nos conditions d’existence et de sécurité. Elle propose d’en finir avec la « croissance verte » qui empêche aujourd’hui de suivre les recommandations ou avis scientifiques. L’incapacité à renoncer à de mauvaises décisions réside dans la course à l’augmentation du PIB des politiques publiques. Il faut rompre avec ce système de et préférer d’autres objectifs comme ceux de l’épanouissement humain et de la préservation du vivant et faire de la transformation écologique un levier d’amélioration de la vie quotidienne du plus grand nombre. Ce qui met en mouvement une société, c’est du sensible, de la culture. Dans les débats de politiques publiques, aujourd’hui, les dimensions sensibles, émotionnelles et culturelles sont oubliées, alors qu’elles sont fondamentales.  
Autour de la table-ronde, plusieurs générations sont représentées. La « génération climat », à laquelle appartient Pierre Cazeneuve, a grandi dans la certitude que tout allait cramer. Le député émet un désaccord sur le thème de la rupture. Selon lui, la rupture est déjà derrière nous, c’est maintenant qu’on entre dans le vif du sujet. Notre ennemi commun est la facilité évidente que l’on a à remettre à demain et trouver des excuses pour ne pas faire d’écologie. Maintenant que la rupture est déjà consommée, il faut propulser toutes les transitions déjà amorcées et aller dans l’écologie difficile, celle qui fait renoncer à des comportements désirables. Il faut créer un récit global, un peu de rêve.  
Flora Ghebali commence sa prise de parole par se décrire comme « rocardienne ». Cette dernière n’est pas habituée à parler devant des « éco-lucides » puisqu’elle essaie d’aller conquérir des espaces hostiles à travers son entreprise Coalitions et ses prises de parole dans les médias (édito BFMTV et Les grandes gueules RMC). Sur ces plateaux, elle est souvent seule à défendre les questions écologiques. Quand on est démocrates, nos armes sont assez faibles. Mais peut-être que le vrai amour de la conduite du changement démocratique est d’accepter cela. Chaque personne convaincue compte. Elle rappelle que sur les réseaux sociaux, nous ne sommes que 250 par bulle cognitive. Ainsi, aller d’une bulle cognitive à l’autre est la première chose à faire d’après elle.  
Le représentant des médias à cette table-ronde est Vincent Giret, qui pense que le journalisme n’a jamais été aussi utile mais qu’il fait aussi partie du problème. Il cite Jean-François Revel : « Je ne connais pas de profession plus aveugle à elle-même que le journalisme ». L’ancien directeur de Radio France remarque que les journalistes passent leur temps à interroger les questions du monde sans réflexion sur la manière de le faire, cela provoquant une crise de confiance envers cette profession. Sa génération a vécu 4 grandes ruptures d’une grande violence en journalisme : une rupture technologique, une rupture des usages, celle des modèles économiques, et ces trois ruptures ont provoqué la quatrième, le tsunami, qui est la submersion, la fatigue informationnelle. Toutes ces ruptures ont emporté les digues de confiance. Aujourd’hui, le paysage de l’information est complètement saturé et hyper concurrentiel, provoquant des manipulations d’information et de la désinformation. Tous les journalistes ont fait des sciences humaines, mais selon V. Giret, les grandes questions qui nous assaillent aujourd’hui ont pour la plupart une résonnance scientifique et/ou économique. Il y a donc un gros enjeu de formation des journalistes sur ces sujets. Cette situation trace un chemin pour le journalisme d’après Vincent Giret : le catastrophisme nourrit le déni et l’inaction. Eclairer les voies de passage est beaucoup plus mobilisateur. Dans les rédactions, il y a un devoir d’éclairer ces voix de passage d’après lui : il faut une alliance du journalisme et de la connaissance pour embarquer dans les rédactions des scientifiques et des ingénieurs. 
Nous sommes heureusement loin de la situation d’il y a 10 ans, au moment de la création de La Fabrique Ecologique, rappelle Chantal Jouanno, notamment en termes de traitement médiatique. Il existe tout de même un enjeu majeur de désinformation. A très court terme, la question n’est pas de savoir quelles informations sont fausses mais lesquelles sont vraies. Et c’est là le rôle du journalisme. Une étude de l’ADEME révèle que 90% des publicités nous incitent à consommer davantage. Dans les années 1980, nous recevions en moyenne 300 messages publicitaires/jour/personne. Aujourd’hui, c’est 1200. Il va donc falloir s’attaquer au cœur du sujet : sortir d’un modèle de société qui est le « toujours plus » pour aller vers un modèle de société qualitatif. C. Jouanno termine par remercier Lucile Schmidt et Géraud Guibert, les parents de La Fabrique Ecologique : « c’est à eux qu’on doit tout ». 
Après une série de questions de la salle, Géraud Guibert questionne la faible portée des « bonnes décisions » en matière d’écologie et en propose certaines, trop peu abordées selon lui, comme le rapprochement entre le domicile et le travail, la sortie du capitalisme par le reconditionnement, le partage et l’économie de proximité. Le président de La Fabrique Ecologique alerte sur le profond clivage qui est en train de se creuser et de s’aggraver dans la population entre ceux qui ont envie de faire des choses et ceux qui ne le peuvent ou ne le veulent pas. Ces derniers sont amenés à rejeter l’ensemble des solutions pour le climat. Dans beaucoup de pays occidentaux, on observe une montée des sujets anti-climat relayés par les populistes. 
En guise de conclusion, Géraud Guibert rappelle que La Fabrique Ecologique a été créée dans le but d’être utile. Comment être davantage utile au débat public et aux ruptures nécessaires en matière de transition écologique ? La rigueur est l’ADN de La Fabrique Ecologique où sont menées des procédures de nature scientifique, ce qui garantit le sérieux du diagnostic. Dans un contexte de fake news, le rôle de La Fabrique Ecologique et des think tanks en général est d’être une référence pour le débat public, malgré ses limites. De plus, l’objectif est de déboucher sur du concret. Les choses concrètes ne sont pas débattues dans l’espace public. Il y a des débats sur les montants financiers, les choix techniques ou les mesures d’interdictions. Ces débats n’emmènent pas les gens par définition. La Fabrique Ecologique conjugue l’économique, le social et l’écologique ; l’approche n’est pas que technique. Le président rappelle que La Fabrique Ecologique est le seul think tank à avoir un dispositif de co-construction citoyenne. 
 
Vous pouvez retrouver le replay de la Table Ronde sur notre chaîne YouTube ou ici.

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