09

mars

2022

Les controverses écologiques

Évènement passé

Quelles transformations des modes de consommation pour la transition écologique ?

Les intervenants

Géraud Guibert

Président de La Fabrique Ecologique

Pascale Hébel

Directrice du pôle Consommation et entreprise au Crédoc

Sophie Dubuisson-Quellier

Directrice de recherche en sociologie au CNRS, directrice adjointe du Centre de Sociologie des Organisations et membre du Haut Conseil pour Climat

Gildas Bonnel

Président de Sidièse, agence de conseil en communication responsable

Antoine Autier

Responsable du service des études et du lobby au sein de l'UFC-Que Choisir

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Le 9 mars 2022, en partenariat avec Sorbonne Développement Durable, s’est tenue la douzième édition des Controverses Écologiques. Le débat « Quelles transformations des modes de consommation pour la transition écologique » a été animé par Géraud Guibert. Pascale Hébel, Directrice du pôle Consommation et entreprise au Crédoc, Sophie Dubuisson-Quellier, Directrice de recherche en sociologie au CNRS, directrice adjointe du Centre de Sociologie des Organisations et membre du Haut Conseil pour Climat, Gildas Bonnel, Président de Sidièse, agence de conseil en communication responsable et Antoine Autier, Responsable du service des études et du lobby au sein de l’UFC-Que Choisir étaient en notre compagnie pour débattre de cet enjeu.
En introduction, ont été soulignées les grandes évolutions récentes du pouvoir d’achat. Globalement ces dernières années, il a évolué de façon hétérogène (il n’évolue pas pour les catégories défavorisées notamment). La part des dépenses contraintes (énergie, loyer, etc.) ainsi que l’aspiration à consommer de manière plus responsable ont augmenté.
Les intervenant.e.s se sont exprimé.e.s sur les évolutions structurelles de la consommation. Quelques grandes observations sont à prendre en compte lors de l’élaboration des mesures de la transition écologique :
– La hausse de prix de l’énergie et de l’alimentation accroit une inégalité préexistante (les inégalités autour des dépenses contraintes se sont accentuées au cours des quarante dernières années) et réduit le pouvoir d’achat effectif des ménages (ou « reste à vivre »).
– Les émissions de gaz à effet de serre du régime alimentaire moyen baissent, du fait d’une diminution de la part carnée. À cela, trois facteurs explicatifs : vieillissement de la population, prise en compte des problématiques nutritionnelles et des enjeux écologiques.
– Concernant les évolutions des comportements de consommation vers des modes plus responsables, les plus « engagé.e.s » ne sont pas ceux.celles qui font les meilleurs gestes. Selon les travaux du CREDOC, ce profil consommateur se caractérise par un haut capital culturel. De petits gestes de consommation seront certes déculpabilisants, mais leur bénéfice est annulé par l’impact d’autres consommations (automobile, avion). La contribution aux émissions de gaz à effet de serre est donc inégale entre groupes sociaux.
– En vue d’orienter la consommation, l’information est un moyen de diriger le consommateur vers des pratiques plus responsables (en première étape). En ce sens, des propositions internalisent les externalités des produits (« prix vert », « bonus-malus »).
– Le nexus « communication, publicité, média », chaîne de valeur entremêlée, est un puissant outil pour pourvoir le consommateur en éléments de comparaison entre produits. La Convention Citoyenne pour le Climat présentait plusieurs mesures prohibitives pour le secteur. Il convient donc de s’interroger quant à sa capacité/volonté de valorisation d’un changement de comportement et d’usage. Il convient également de questionner l’efficacité des chartes d’auto-régulation du secteur.
– La représentation d’un bonheur basé sur l’accumulation reste prégnante, notamment chez les plus jeunes et les populations les plus éloignées de la consommation. Autrement dit, chez ceux.celles qui aspirent à posséder ce que d’autres ont pu consommer auparavant. Deux catégories de populations demeurent aussi particulièrement imperméables au changement : les plus de soixante ans et les plus riches.
– Le marché représente un espace d’incitation et d’information dans tous sens auxquelles les consommateur.ice.s sont soumis.e.s, de la sobriété à la consommation débridée. En miroir de ce que l’on observe sur l’énergie et avec les énergies renouvelables, la consommation engagée s’exprime aux marges du marché et non pas en son cœur. C’est une consommation peu ancienne, qui ouvre de nouveaux espaces de consommation. Le secteur de l’offre y répond sur un plan marketing. Avec cette double détente, le consommateur est placé dans système d’injonctions contradictoires.
La seconde partie du débat s’est penchée sur les possibilités d’action, où comment outiller les consommateur.ice.s de manière à orienter leurs choix.
– Une attention particulière portera sur la construction d’outils informatifs. Au-delà de la bonne nouvelle de l’arrivée d’un système de notes, la possibilité d’interférences de la part des professionnels des secteurs concernés dans l’élaboration des indicateurs qui les composent nécessite une vigilance accrue de la part des ONG.
– Contre-intuitivement, les outils d’affichage (Nutriscore, etc.) sont des outils de régulation de l’offre et non de la demande, en cela qu’ils redistribuent une partie des mécanismes de la concurrence sur d’autres objectifs que les initiaux.
– La normativité doit être en mesure d’envoyer des messages clairs sur des consommations encouragées et découragées, en s’appuyant par exemple sur le biais de la taxe. La question de la consommation étant centrale, le signal-prix est un levier d’action. Pour preuve, lorsque les offres durables ont des prix similaires aux offres classiques, elles s’avèrent tout aussi attirantes pour les consommateur.ice.s.
En conclusion, les intervenant.e.s ont souligné que des modifications de consommation se sont esquissées durant la pandémie de Covid (consommations ostentatoires chamboulées, par exemple). Elles sont à identifier et à accompagner. Moins consommer neuf, réparer sont aussi des pistes. Ces pistes doivent être identifiées, accompagnées et associées à d’autres, telles que la sobriété ou la réparation par exemple.