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Évènements passés

20

mars

2024

Les controverses écologiques

Évènement passé

Quelle place pour l’écologie dans le débat public ?

Les intervenants

David Chavalarias

Mathématicien, directeur de recherche au CNRS au CAMS/EHESS et directeur de l'Institut des Systèmes Complexes de Paris Île-de-France, auteur de "Toxic Data, comment les réseaux manipulent nos opinions", éditions Flammarion (2022)

Stéphane Foucart

Journaliste au service Planète du journal Le Monde, auteur de plusieurs ouvrages dont "Les gardiens de la raison", éditions La Découverte (2020)

Perrine Simon-Nahum

Docteure en histoire, directrice de recherche au CNRS et professeure attachée au département de philosophie de l’Ecole normale supérieure, autrice de "Les déraisons modernes", éditions de l'Observatoire (2021)

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La Fabrique Ecologique et Ecocampus ENS, association écologiste créée et animée par des étudiantes et étudiants de l’École Normale Supérieure, lancent en partenariat pour l’année 2023-2024 un cycle de Controverses Ecologiques. Ces événements au format innovant, gratuits et ouverts à tous, réunissent et font débattre des personnalités aux profils divers, ayant travaillé et publié sur un sujet d’actualité.
La deuxième Controverse Ecologique de ce partenariat avait pour thème « Quelle place de l’écologie dans le débat public ? »
Pauline Bureau et Abel Couaillier, en charge de l’animation de cette deuxième controverse ont évoqué l’ambivalence de la place de l’écologie dans le débat public. Enjeux tantôt dramatiquement pris en compte, tantôt oubliés, même s’ils se diversifient et ont une place croissante dans le débat public, le climatoscepticisme reste très présent et l’urgence écologique peine à être une priorité ainsi qu’à se démocratiser.
La séquence 1 visait à s’interroger sur la présence suffisante ou non de l’écologie dans le débat public
Stéphane Foucart, Journaliste au service Planète du journal Le Monde, a rappelé la place insuffisante de l’écologie dans le débat public, le manque de qualité des discussions qui tournent davantage autour de commentaires politiques. Il déplore l’effacement des questions écologiques au profit de celles d’ordre socioéconomiques. Le débat public procède, à son sens, à une forme de naturalisation de la catastrophe lente liée aux enjeux écologiques.
David Chavalarias, Mathématicien, directeur de recherche au CNRS au CAMS/EHESS et directeur de l’Institut des Systèmes Complexes de Paris Île-de-France, a attiré notre attention sur la crise existentielle pesant sur les écosystèmes et que les débats portaient sur une vision à court-terme notamment sur le sujet de la biodiversité. Il a insisté sur l’importance de transmettre des connaissances scientifiques sur les écosystèmes et leur rôle dans le maintien des sociétés humaines.
Perrine Simon-Nahum, Docteure en histoire, directrice de recherche au CNRS et professeure attachée au département de philosophie de l’École normale supérieure, a apporté une perspective historique sur l’évolution de la prise en compte de l’écologie. Elle évoque le temps d’acculturation nécessaire à ces enjeux. Si l’écologie est reconnue selon elle dans le débat public, le problème reposerait davantage sur la manière dont les informations sont communiquées, sur le manque de fluidité des échanges qui ne se font pas au même niveau de connaissance et de langage.
La séquence 2 a abordé les fragilités de l’écologie dans le débat public
L’un des éléments clés de cette séquence porte sur la décrédibilisation de la science et sa légitimation par l’innovation et la technologie. Le financement très majoritaire de la technoscience plutôt que de la science viendrait brouiller la distinction entre les deux.
Le manque de culture scientifique, la difficulté à remettre en cause un système socioéconomique, dans lequel des investissements colossaux ont été effectués sont autant d’obstacles à une plus grande reconnaissance médiatique de l’écologie selon David Chavalarias.
Stéphane Foucart, constate une « faillite institutionnelle » de la science, avec une apathie généralisée à l’égard de celle-ci, qui s’accompagne d’une diffusion de la désinformation. Conjointement à ce « piratage de la parole scientifique », le monde médiatique qui est concentré entre les mains d’une petite partie de la population, se perd dans la priorisation des sujets à relayer.
À cela s’ajoute la difficulté de distinguer lobbying, science, et instrumentalisation politique, qui érodent la confiance de la population.
Perrine Simon-Nahum, abonde également en ce sens et relativise cette inculture scientifique en mentionnant que l’inculture économique qui précédait celle-ci a finalement été dépassée. Elle a mentionné également les réseaux sociaux, en tant que facteur contribuant à ce rejet de la science.
La dernière partie de la table ronde s’intéressait aux valeurs associées à l’écologie qui se heurtent au technosolutionnisme
Perrine Simon-Nahum a dénoncé la manière dont les écologistes articulent leur discours autour de l’herméneutique de la peur, venant ainsi compromettre leur audibilité. La politisation extrême de l’écologie, l’érigerait en tant que valeur absolue et indiscutable, ce qui peut rentrer en conflit avec des priorités d’autre nature. L’environnement ne devrait ainsi pas être le tout de la politique.
David Chavalarias a mis en garde sur la manière dont le débat public orientait les votes non pas vers des idées mais vers des personnalités et qu’il devenait de plus en plus polarisé et sous format conflictuel en ligne et hors ligne. Il défend aussi que le technosolutionnisme s’oppose en termes de valeur à la sobriété et donc par extension à l’écologie. Pour lui, c’est à l’humain de s’adapter au climat et non l’inverse.
Stéphane Foucart a également critiqué fortement le technosolutionnisme et les logiques qu’il traduit. Il l’associe à un manque d’imagination pour sortir du carcan socioéconomique, à l’opposé des nouveaux imaginaires que souhaite dessiner l’écologie.
En conclusion, David Chavalarias a souligné l’importance d’inverser le temps, d’agir dès maintenant pour préserver la nature à notre disposition aujourd’hui, car elle sera toujours en meilleur état que demain.

12

octobre

2023

Les controverses écologiques

Évènement passé

Quelles actions revendicatives pour la transition écologique ?

Les intervenants

Caroline Vanuls

Juriste et enseignante-chercheuse à l'Université d'Aix-Marseille et à l'Institut Régional du Travail

Fabien Guimbretière

Secrétaire national de la CFDT responsable de la politique du développement durable, des politiques industrielles, de la recherche, de l'enseignement supérieur et de la coordination en matière de RSE

Alexis Cukier

Maître de conférences à l'Université de Poitiers

François Chartier

Chargé de campagne transport, océan et pétrole chez Greenpeace France

Anne Le Corre

Co-fondatrice du Printemps écologique

Loïc Marzec

Co-président d'Ecocampus ENS

Géraud Guibert

Président de La Fabrique Ecologique

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Le 12 octobre 2023, en partenariat avec Ecocampus ENS, association écologiste créée et animée par des étudiantes et étudiants de l’École Normale Supérieure, s’est déroulée la 13è édition des Controverses-Écologiques, à l’ENS rue d’Ulm. Le débat « Quelles actions revendicatives pour la transition écologique ? » a été animé par Géraud Guibert, président de La Fabrique Ecologique. Parmi les intervenant·e·s, nous avons eu le plaisir de compter sur la présence de Caroline Vanuls, juriste et enseignante-chercheuse à l’Université d’Aix-Marseille et à l’Institut Régional du Travail, Fabien Guimbretière, secrétaire national de la CFDT en charge de la politique du développement durable, des politiques industrielles, de la recherche, de l’enseignement supérieur, et de la coordination en matière de RSE, Alexis Cukier, maître de conférences à l’Université de Poitiers, François Chartier, chargé de campagne transport, océan et pétrole chez Greenpeace France, et Anne Le Corre, co-fondatrice du Printemps écologique. 
Dans un premier temps, les participants ont abordé les actions revendicatives à mettre en place au sein des entreprises pour accélérer la transition écologique, explorant les voies de l’intégration de ces préoccupations au cœur des organisations. Dans un second temps, ils ont échangé sur la manière de discuter de ces actions au sein de la société dans son ensemble. 
Les intervenant·e·s ont souligné à maintes reprises l’importance de la convergence des risques professionnels et environnementaux, mettant en lumière l’impératif d’une transition équitable. Les intervenant·e·s ont rappelé l’origine historique du droit du travail lié à la santé au travail, déjà une question environnementale majeure au XIXe siècle, avec des alliances entre mouvements écologistes et sociaux. Malgré une division ultérieure entre enjeux syndicaux et environnementaux, l’urgence actuelle, marquée par la pandémie, les changements climatiques et les aspirations de la jeunesse, nécessite une approche intégrée, partant de l’urgence écologique pour aborder les questions sociales. Ils et elles ont fortement insisté sur la nécessité d’incorporer les préoccupations environnementales dans le dialogue social, en reconnaissant les droits essentiels des travailleur·euse·s pour qu’ils et elles contribuent activement à la transition écologique. En fin de compte, une transition réussie doit nécessairement prendre en considération les besoins des travailleur·euse·s. 
Le débat autour de la Responsabilité Sociale de l’Entreprise (RSE) a généré des discussions et des divergences d’opinions parmi les intervenant·e·s. Enfin, toutes et tous étaient d’accord pour dire que les organisations syndicales, depuis une dizaine d’années, travaillent activement pour introduire la question environnementale dans le dialogue social. 
Lors de la session de questions, plusieurs sujets cruciaux ont été abordés. Parmi eux, la nécessité d’accompagner les agriculteur·rice·s dans les changements nécessaires pour la transition écologique, la question de la désertion ou de la résistance au changement au sein des entreprises, la possibilité de négocier les prix pour les agriculteur·rice·s, ainsi que le rôle essentiel des syndicats face à la disparition de certaines professions. 
Anne Le Corre a souligné que malgré l’urgence des enjeux, il est essentiel de prendre des décisions démocratiques pour orienter la transition. Elle a mis en évidence l’impact du rapport de force entre les salariés et la direction sur les débats au sein des entreprises. La co-fondatrice du Printemps Ecologique a également mis en avant la nécessité de remettre en question la culture d’entreprise pour encourager un dialogue critique, soulignant le rôle central des syndicats dans la mobilisation et l’inspiration.  
François Chartier a rappelé qu’en premier lieu, il fallait arrêter d’opposer la fin du monde et la fin du mois. Il a précisé que la disparition de professions est un phénomène ancien, et que des politiques publiques appropriées sont essentielles pour gérer ces transitions en investissant de manière adéquate. Il a conclu en soulignant que la transition doit être motivée par l’enthousiasme plutôt que par le désespoir.  
Alexis Cuckier a mis en évidence la nécessité de résister de l’intérieur des entreprises pour orienter ces-dernières vers des transformations écologiques, tout en soulignant l’importance de ne pas négliger les travailleur·euse·s précaires qui n’ont souvent pas le choix. Il a également relevé une lacune dans la planification écologique, qui a omis de prendre en compte le rôle essentiel des travailleur·euse·s, malgré le fait qu’ils et elles soient les mieux placé·e·s pour impulser des changements significatifs.  
Fabien Guimbretière a rappelé l’importance de l’accord ANI, soulignant que, bien que perfectible, il représente une avancée significative dans la promotion du dialogue social. Il a également évoqué la complexité de la transition écologique et la nécessité d’impliquer l’ensemble des parties prenantes pour une transformation équitable. Il a posé la question cruciale de la sobriété comme clé pour une transition réussie, insistant sur la nécessité d’anticiper les solutions pour garantir la sécurité du processus. 
Caroline Vanuls a plaidé en faveur de changements dans les règles du jeu, de renforcement des outils juridiques, et d’une action des syndicats au niveau des instances européennes et internationales pour favoriser la transition. Elle a souligné le besoin d’accompagner les travailleur·euse·s dans leur prise de conscience environnementale, d’adapter leurs compétences et de former les élu·e·s et militant·e·s syndicaux. Caroline Vanuls a également expliqué que les entreprises ont souvent utilisé la Responsabilité Sociale de l’Entreprise (RSE) pour masquer leurs actions et éviter la régulation étatique.  
En conclusion, Géraud Guibert a rappelé l’importance d’être en phase avec son activité, qu’elle soit professionnelle ou syndicale, pour être efficace. Il a encouragé l’engagement collectif pour influencer les choix collectifs.  
 
 

09

mars

2022

Les controverses écologiques

Évènement passé

Les Controverses Écologiques : Quelles transformations des modes de consommation pour la transition écologique ?

Les intervenants

Géraud Guibert

Président de La Fabrique Ecologique

Pascale Hébel

Directrice du pôle Consommation et entreprise au Crédoc

Sophie Dubuisson-Quellier

Directrice de recherche en sociologie au CNRS, directrice adjointe du Centre de Sociologie des Organisations et membre du Haut Conseil pour Climat

Gildas Bonnel

Président de Sidièse, agence de conseil en communication responsable

Antoine Autier

Responsable du service des études et du lobby au sein de l'UFC-Que Choisir

Voir la vidéo Ecouter le podcast
Le 9 mars 2022, en partenariat avec Sorbonne Développement Durable, s’est tenue la douzième édition des Controverses Écologiques. Le débat « Quelles transformations des modes de consommation pour la transition écologique » a été animé par Géraud Guibert. Pascale Hébel, Directrice du pôle Consommation et entreprise au Crédoc, Sophie Dubuisson-Quellier, Directrice de recherche en sociologie au CNRS, directrice adjointe du Centre de Sociologie des Organisations et membre du Haut Conseil pour Climat, Gildas Bonnel, Président de Sidièse, agence de conseil en communication responsable et Antoine Autier, Responsable du service des études et du lobby au sein de l’UFC-Que Choisir étaient en notre compagnie pour débattre de cet enjeu.
En introduction, ont été soulignées les grandes évolutions récentes du pouvoir d’achat. Globalement ces dernières années, il a évolué de façon hétérogène (il n’évolue pas pour les catégories défavorisées notamment). La part des dépenses contraintes (énergie, loyer, etc.) ainsi que l’aspiration à consommer de manière plus responsable ont augmenté.
Les intervenant.e.s se sont exprimé.e.s sur les évolutions structurelles de la consommation. Quelques grandes observations sont à prendre en compte lors de l’élaboration des mesures de la transition écologique :
– La hausse de prix de l’énergie et de l’alimentation accroit une inégalité préexistante (les inégalités autour des dépenses contraintes se sont accentuées au cours des quarante dernières années) et réduit le pouvoir d’achat effectif des ménages (ou « reste à vivre »).
– Les émissions de gaz à effet de serre du régime alimentaire moyen baissent, du fait d’une diminution de la part carnée. À cela, trois facteurs explicatifs : vieillissement de la population, prise en compte des problématiques nutritionnelles et des enjeux écologiques.
– Concernant les évolutions des comportements de consommation vers des modes plus responsables, les plus « engagé.e.s » ne sont pas ceux.celles qui font les meilleurs gestes. Selon les travaux du CREDOC, ce profil consommateur se caractérise par un haut capital culturel. De petits gestes de consommation seront certes déculpabilisants, mais leur bénéfice est annulé par l’impact d’autres consommations (automobile, avion). La contribution aux émissions de gaz à effet de serre est donc inégale entre groupes sociaux.
– En vue d’orienter la consommation, l’information est un moyen de diriger le consommateur vers des pratiques plus responsables (en première étape). En ce sens, des propositions internalisent les externalités des produits (« prix vert », « bonus-malus »).
– Le nexus « communication, publicité, média », chaîne de valeur entremêlée, est un puissant outil pour pourvoir le consommateur en éléments de comparaison entre produits. La Convention Citoyenne pour le Climat présentait plusieurs mesures prohibitives pour le secteur. Il convient donc de s’interroger quant à sa capacité/volonté de valorisation d’un changement de comportement et d’usage. Il convient également de questionner l’efficacité des chartes d’auto-régulation du secteur.
– La représentation d’un bonheur basé sur l’accumulation reste prégnante, notamment chez les plus jeunes et les populations les plus éloignées de la consommation. Autrement dit, chez ceux.celles qui aspirent à posséder ce que d’autres ont pu consommer auparavant. Deux catégories de populations demeurent aussi particulièrement imperméables au changement : les plus de soixante ans et les plus riches.
– Le marché représente un espace d’incitation et d’information dans tous sens auxquelles les consommateur.ice.s sont soumis.e.s, de la sobriété à la consommation débridée. En miroir de ce que l’on observe sur l’énergie et avec les énergies renouvelables, la consommation engagée s’exprime aux marges du marché et non pas en son cœur. C’est une consommation peu ancienne, qui ouvre de nouveaux espaces de consommation. Le secteur de l’offre y répond sur un plan marketing. Avec cette double détente, le consommateur est placé dans système d’injonctions contradictoires.
La seconde partie du débat s’est penchée sur les possibilités d’action, où comment outiller les consommateur.ice.s de manière à orienter leurs choix.
– Une attention particulière portera sur la construction d’outils informatifs. Au-delà de la bonne nouvelle de l’arrivée d’un système de notes, la possibilité d’interférences de la part des professionnels des secteurs concernés dans l’élaboration des indicateurs qui les composent nécessite une vigilance accrue de la part des ONG.
– Contre-intuitivement, les outils d’affichage (Nutriscore, etc.) sont des outils de régulation de l’offre et non de la demande, en cela qu’ils redistribuent une partie des mécanismes de la concurrence sur d’autres objectifs que les initiaux.
– La normativité doit être en mesure d’envoyer des messages clairs sur des consommations encouragées et découragées, en s’appuyant par exemple sur le biais de la taxe. La question de la consommation étant centrale, le signal-prix est un levier d’action. Pour preuve, lorsque les offres durables ont des prix similaires aux offres classiques, elles s’avèrent tout aussi attirantes pour les consommateur.ice.s.
En conclusion, les intervenant.e.s ont souligné que des modifications de consommation se sont esquissées durant la pandémie de Covid (consommations ostentatoires chamboulées, par exemple). Elles sont à identifier et à accompagner. Moins consommer neuf, réparer sont aussi des pistes. Ces pistes doivent être identifiées, accompagnées et associées à d’autres, telles que la sobriété ou la réparation par exemple.

09

février

2022

Les controverses écologiques

Évènement passé

Les Controverses Écologiques : Quelle nouvelle économie pour la transition écologique ?

Les intervenants

Géraud Guibert

Président de La Fabrique Ecologique

Harold Levrel

Professeur en économie écologique à AgroParisTech et chercheur au CIRED

Mireille Bruyère

Maîtresse de conférences en sciences économiques à l'université de Toulouse Jean Jaurès, chercheuse au Centre de recherche et d'études Travail organisation pouvoir du CNRS et membre du Conseil scientifique d'ATTAC France

Nathalie Boyer

Ambassadrice de l'Economie circulaire auprès du Ministère de la Transition Ecologique, vice-présidente du Conseil National de l’économie circulaire et déléguée générale d'ORÉE

Philippe Portier

Secrétaire national de la CFDT au sein de la Commission Exécutive

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Le 9 février 2022, en partenariat avec Sorbonne Développement Durable, s’est tenue la onzième édition des Controverses Écologiques. Le débat « Quelle nouvelle économie pour la transition écologique » a été animé par Géraud Guibert. Harold Levrel, Professeur en économie écologique à AgroParisTech et chercheur au CIRED, Mireille Bruyère, Maîtresse de conférences en sciences économiques à l’université de Toulouse Jean Jaurès, chercheuse au Centre de recherche et d’études “Travail organisation pouvoir” du CNRS et membre du Conseil scientifique d’ATTAC France, Nathalie Boyer, Ambassadrice de l’Economie circulaire auprès du Ministère de la Transition Ecologique, vice-présidente du Conseil National de l’économie circulaire et déléguée générale chez ORÉE et Philippe Portier, Secrétaire national de la CFDT au sein de la Commission Exécutive étaient en notre compagnie pour débattre de cet enjeu.
 
 
En introduction, il a été regretté l’absence des réflexions sur la transformation structurelle de l’économie dans les débats électoraux. L’accent a également été mis sur la nécessité de sortir des clivages du passés (planification/marché, nationalisation/privatisation…) qui ne sont pas au cœur des nouveaux clivages découlant de la transition écologique.
Les intervenant.e.s ont tout d’abord été invité.e.s à répondre à la question suivante : En quoi le système économique actuel ne convient pas et comment faut-il le transformer ? Chaque intervenant a fait part de ses convictions, avec des approches différentes :
– la tendance à penser que le sens du progrès réside dans la croissance des sphères serait le problème majeur. On ne pourrait pas parler de transition écologique sans remettre en question la croissance économique ;
– les indicateurs qui guident l’action publique devraient être élargis, notamment à des enjeux écologiques : l’artificialisation des sols et les gaz à effet de serre. Ainsi, pour défendre la place du non marchand, des outils légaux se déploient et ne demandent qu’à être appliqués ;
– il faut raisonner en termes d’économie circulaire. Dans ce contexte, la sobriété est essentielle et vient questionner le sujet des ressources ;
– il convient de choisir les secteurs qui doivent décroître et de faire d’avantage appel aux services des écosystèmes naturels sans puiser dans leurs ressources en misant sur l’économie symbiotique.
La seconde partie a permis d’aborder la question de l’action: que peut-on faire pour rendre l’économie compatible avec écologie. Plusieurs pistes ont été évoquées. Sur l’économie circulaire, on a souvent tendance à aborder l’économie circulaire uniquement par l’aspect aval et à ne pas évoquer l’économie de la fonctionnalité. L’approche reste trop portée sur les déchets. Il a aussi été rappelé que l’économie circulaire semble dépassée ou non appropriée pour certains secteurs (exemple du textile avec la fast fashion pour lequel le système de recyclage est complètement saturé).
Un autre levier d’action envisagé est l’économie de proximité. Les intervenant.e.s ont montré qu’il fallait envisager une relocalisation globale, pour des raisons aussi bien environnementales que sociales, même si ce processus est très complexe (question des coûts de production, des capacités productives, du savoir-faire). Cependant, ce type d’économie n’est pas pertinent sur tous les plans, il faut ainsi d’abord interroger pour quel contexte il est intéressant de relocaliser. Pour que cela fonctionne, il faut d’abord regarder les besoins du territoire, faire un écosystème productif et des synergies entre les entreprises d’un même territoire.
Enfin, les intervenant.e.s ont été appelés à proposer leur recommandations. Les niveaux de productivité actuels sont obtenus par la division du travail. Celle-ci implique des inégalités économiques et sociales et des impacts écologiques insoutenables. La transition écologique doit à l’inverse faire diminuer les inégalités.
De manière générale, il va falloir faire disparaître certains secteurs et entreprises tout en transformant les emplois détruits. La question se pose donc d’une garantie d’emploi pour favoriser la création des emplois verts. Il y a aussi tout un ensemble de normes, de règles de fiscalité qui vont devoir être adaptées à la transition écologique.
 Il convient enfin de développer une forme de démocratisation des organisations du travail. Les grandes structures productives sont en outre si puissantes qu’il faudrait diminuer la taille des systèmes de production pour que la bifurcation productive soit effective. Pour que tous ces objectifs fonctionnent, il faut impérativement anticiper et mettre en place des revenus de transition.
En conclusion, les intervenant.e.s ont mis en évidence la nécessité d’adopter une approche systémique et de sortir d’une vision en silo afin d’enrichir le débat.

19

janvier

2022

Les controverses écologiques

Évènement passé

Les Controverses Écologiques : Quelle nouvelle organisation du territoire pour la transition écologique ?

Les intervenants

Hélène Peskine

Secrétaire permanente du Plan Urbanisme Construction Architecture (PUCA) au sein du Ministère de la Transition écologique.

Magali Reghezza-Zitt

Géographe, co-directrice du Centre de formation sur l’environnement et la société de l'ENS, membre du HCC.

Xavier Desjardins

Professeur en urbanisme et Aménagement de l'espace à Sorbonne Université, chercheur et consultant (coopérative Acadie), auteur de nombreux ouvrages sur l'aménagement du territoire.

Olivier Razemon

Journaliste indépendant et auteur du livre : "Les Parisiens", une obsession française - anatomie d'un déséquilibre.

Géraud Guibert

Président de la Fabrique Écologique

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Le 19 janvier 2022, en partenariat avec Sorbonne Développement Durable, s’est déroulée la dixième édition des Controverses Écologiques. Le débat « Quelle nouvelle organisation du territoire pour la transition écologique » a été animé par Géraud Guibert, président de La Fabrique Ecologique. Hélène Peskine, Secrétaire permanente du Plan Urbanisme Construction Architecture (PUCA) au sein du Ministère de la Transition écologique ; Magali Reghezza-Zitt, géographe, co-directrice du Centre de formation sur l’environnement et la société de l’ENS, membre du HCC ; Xavier Desjardins, professeur en urbanisme et Aménagement de l’espace à Sorbonne Université, chercheur et consultant (coopérative Acadie), auteur de nombreux ouvrages sur l’aménagement du territoire et Olivier Razemon, journaliste indépendant et auteur du livre : « Les Parisiens », une obsession française – anatomie d’un déséquilibre étaient en notre compagnie pour débattre de cet enjeu .
En introduction, il a été rappelé que cette controverse s’inscrit dans un cycle de discussions sur des sujets structurels qui devraient être au cœur des débats autour de la présidentielle. Le choix du terme « organisation » plutôt que celui d’« aménagement » est volontaire car il ne s’agit pas ici seulement d’un enjeu d’infrastructures. Par ailleurs, s’il est évident que le mille-feuille territorial ne facilite pas la transition écologique, cette controverse n’a pas vocation à traiter des problèmes de l’architecture des collectivités locales.
Les intervenant.e.s ont commencé par expliciter leur vision de l’organisation du territoire dans la transition écologique. Aujourd’hui, elle est trop souvent considérée comme le mode de relation entre l’Etat et les collectivités locales alors qu’une vision holistique permettrait de s’en servir comme un levier invisible permettant d’aborder l’ensemble des dimensions de la transition écologique. D’un autre côté, l’organisation du territoire appelle à une refondation intellectuelle : il faut penser la diversité des modèles de transition par les territoires.
La première partie du débat s’est concentrée sur l’approche locale de l’organisation du territoire en termes de rapprochement entre domicile, lieu de travail, lieu de loisir et lieu de consommation. Les intervenant.e.s ont d’abord rappelé la nécessité de se méfier des limites d’une telle conception : la vie n’étant pas linéaire, les individus ne sont pas assignés à résidence, il est donc impossible de fixer un lien perpétuel entre là où on travaille et là où on vit. D’autre part, l’objectif de rapprochement des emplois et des habitations est, certes souhaitable, mais extrêmement difficile à mettre en œuvre, notamment parce que tous.tes les citoyen.ne.s ne vivent pas dans un seul logement (10 % des français.e.s vivent quotidiennement dans deux logements différents). De la même manière, si les français.e.s prennent de plus en plus conscience de l’aspect subi, imposé de leurs transports quotidiens, des contradictions demeurent. En effet, une enquête de l’Insee montre que les individus désirent à la fois se rapprocher de leur lieu de travail mais refuse d’abandonner la voiture et le pavillon. L’intérêt ici serait donc davantage d’apprendre à articuler les fonctions urbaines entre elles. Enfin, il convient de regarder l’ensemble des parties prenantes, en particulier les entreprises, qui dépendent et impactent l’organisation du territoire et dont les flux ont un gros impact carbone. D’un autre côté, l’organisation du territoire va devoir prendre en compte une nouvelle donne : l’environnement et le climat changent, ce qui sous-tend des pressions supplémentaires sur les systèmes (en termes de valeurs, de co-bénéfices). Dans ce contexte, les aspirations de gouvernance peuvent changer très vite. Certains facteurs qui incitaient auparavant les populations à s’installer quelque part ne vont plus être rentables (augmentation du coût des énergies fossiles, pression sur les ressources alimentaires/agricoles, exposition aux risques…). La discussion sur l’organisation du territoire perd son sens si on ne prend pas en compte ces données changeantes. Pourtant, les documents d’urbanisme sont très en retard dans la prise en compte de tous ces nouveaux impacts à court terme.
La seconde partie de la Controverse a cherché à analyser deux enjeux sous-jacents à l’organisation du territoire : l’étalement urbain et l’artificialisation des sols. S’il existe tout un arsenal juridique pour contraindre l’occupation des zones à risques, l’enjeu principal est de parvenir à le faire respecter. Or, à ce titre, la question foncière joue un rôle déterminant. C’est pourquoi l’objectif de zéro artificialisation nette (ZAN) ne résiste pas à la pratique du terrain et ne doit pas être pensé uniquement à travers une seule dimension. L’objectif ZAN est aussi problématique de par son ambiguïté : on ne sait pas vraiment ce dont on parle. En outre, les modalités actuelles de fonctionnement des services publics ne permettent pas sa mise en œuvre.
Enfin, la troisième partie du débat s’est intéressé aux fractures territoriales. Les intervenant.e.s ont rappelé que les métropoles n’étaient pas vivables à long terme d’un point de vue écologique (pollution) mais aussi psychologique (mal-être) ou économique (coût de l’immobilier à Paris). D’où le rejet de la part des autres régions vis-à-vis de la région parisienne, une autre forme de fracture territoriale qui sous-tend la question de la vivabilité du territoire. Par ailleurs, le but d’une politique d’aménagement du territoire n’est pas de redistribuer les populations mais d’égaliser les conditions de chance et de vie entre les territoires. En France, les villes ont tendance à avoir une oscillation démographique lente. Il faut donc affronter de manière plus réaliste l’évolution démographique : comment vivre bien tout en étant plus ou moins nombreux, sans chercher à atteindre une taille de population optimale et sortir de l’idée que l’attractivité d’une ville est liée au nombre de ses habitants.
Pour conclure, les intervenant.e.s ont noté l’ambition que soulève la question de l’organisation du territoire dans un contexte de transition écologique. L’adaptation signifie qu’il va falloir des grands travaux avec une vision nationale. Pour cela, il faut dépasser le débat local versus national qui empêche d’avancer. A l’heure actuelle, les objectifs de la Stratégie Nationale Bas carbone (SNCB) ne peuvent être remplis car l’organisation du territoire ne le permet pas : il faut à la fois des objectifs, des jalons temporels et des mécanismes de compensation.
 

Les controverses écologiques

Le concept

Les Controverses Ecologiques ont pour objectif de réunir des personnalités ayant travaillé sur le fond sur un sujet d’actualité et de les faire débattre et échanger. Depuis novembre 2018, ces Controverses sont organisées en partenariat avec Sorbonne Développement Durable.